mercredi 29 avril 2015

Sans commentaire(s)







CHATEAUBRIAND. Nuit de printemps











Nuit de printemps

Le ciel est pur, la lune est sans nuage :
Déjà la nuit au calice des fleurs
Verse la perle et l'ambre de ses pleurs ;
Aucun zéphyr n'agite le feuillage.

Sous un berceau, tranquillement assis,
Où le lilas flotte et pend sur ma tête,
Je sens couler mes pensers rafraîchis
Dans les parfums que la nature apprête.

Des bois dont l'ombre, en ces prés blanchissants,
Avec lenteur se dessine et repose,
Deux rossignols, jaloux de leurs accents,
Vont tour à tour réveiller le printemps
Qui sommeillait sous ces touffes de rose.

Mélodieux, solitaire Ségrais,
Jusqu'à mon coeur vous portez votre paix !
Des prés aussi traversant le silence,
J'entends au loin, vers ce riant séjour,
La voix du chien qui gronde et veille autour
De l'humble toit qu'habite l'innocence.

Mais quoi ! déjà, belle nuit, je te perds !
Parmi les cieux à l'aurore entrouverts,
Phébé n'a plus que des clartés mourantes,
Et le zéphyr, en rasant le verger,
De l'orient, avec un bruit léger,
Se vient poser sur ces tiges tremblantes.





François-René de CHATEAUBRIAND
1768-1848








jeudi 23 avril 2015

Oskar Gröning





Trop tardif, ce procès d’un vieillard de 93 ans ? Non, il arrive à point nommé pour répondre aux négationnistes de la Shoah.

Oskar Gröning, vieillard de 93 ans, est arrivé hier à son procès appuyé sur son déambulateur. Le 
« comptable d’Auschwitz » va devoir rendre des comptes à la justice allemande après une longue vie d’impunité. Un procès qui arrive bien tard, trop tard, dira-t-on. Eh bien non, il arrive au contraire à point nommé, en tout cas de ce côté du Rhin, pour répondre à tous ceux qui distillent chez nous le poison du négationnisme et à tous ceux qui les écoutent…

Aussi incroyable que cela puisse paraître, c’est même la montée des thèses révisionnistes qui l’a conduit à sortir du silence et à s’exposer à un procès au soir de sa vie. Il sera sans doute le dernier ancien nazi à être jugé et à témoigner des horreurs des camps d’extermination et des chambres à gaz. Cette réalité qu’un Jean-Marie Le Pen s’obstine à qualifier de « point de détail de l’Histoire » dans Rivarol, une revue antisémite pour laquelle le film Shoah est un « navet »… Une réalité qu’un Dieudonné tourne en dérision dans ses « spectacles » devant un public ravi, abreuvé de son écœurant « Shoah nanas »… Puisque les kilomètres de films tournés par les nazis eux-mêmes puis par les Alliés à la libération des camps, n’ont pas suffi à faire taire tous les émules de Faurisson, le récit d’Oskar Gröning leur imposera-t-il enfin le silence ? On peut malheureusement en douter. Il ne sait sans doute pas, Oskar Gröning, qu’en France, l’enseignement de la Shoah soulève des contestations dans les salles de classe ! Alors plutôt que de condamner ce vieillard à finir sa vie en prison, les juges devraient l’envoyer dans les collèges pour témoigner auprès des jeunes générations de ce qu’il a vu et dont il a été complice à son petit niveau… 

Lui, l’obscur « comptable » qui collectait l’argent des déportés, pourrait ainsi clouer le bec, tant qu’il est encore temps, à tous les faux-monnayeurs de l’Histoire.





samedi 18 avril 2015

Jean d'O. dans la Pléiade




"Vos livres suscitent toujours des compliments, y compris de ceux qui ne les lisent pas, vous avez réussi toute votre vie à être aimé... Comment avez-vous fait ?" 
Ainsi François Hollande s'adressait-il à Jean d'Ormesson en novembre dernier, avant de lui remettre la grand-croix de la Légion d'honneur. La discrète perfidie de l'hommage n'aura pas échappé à l'intéressé, mais les médailles sont peu de chose face à l'honneur suprême qu'Antoine Gallimard a offert à "Jean d'O" : rejoindre le petit cercle des auteurs entrés vivants dans la collection de la Pléiade. L'affaire a été vite conclue, et vite menée à bien : moins d'un an se sera écoulé entre la proposition et la publication, ce 18 avril, du volume qui permet au journaliste et écrivain de rejoindre, à 89 ans, quinze des plus grands auteurs du XXe siècle :

Philippe Jaccottet est entré en Pléiade en 2014, à 89 ans.

Milan Kundera en 2013, à 84 ans.

Claude Lévi-Strauss en 2008, à 100 ans. 

Nathalie Sarraute en 1996, à 96 ans.

Marguerite Yourcenar en 1982, à 79 ans.

Eugène Ionesco en 1991, à 82 ans.

Julien Gracq en 1989, à 79 ans.

René Char en 1983, à 76 ans.

Saint-John Perse en 1972, à 85 ans.

Julien Green en 1972, à 63 ans.

Roger Martin du Gard en 1955, à 74 ans.

Henry De Montherlant en 1955, à 60 ans.

Paul Claudel en 1948, à 80 ans.

André Malraux en 1947, à 46 ans.

André Gide en 1939, à 70 ans.

Céline, Claude Simon, Jean-Paul Sartre et Jean Giono sont morts avant de voir paraître les volumes auxquels ils collaboraient. Henri Michaux est le seul à avoir refusé l'honneur.