dimanche 13 mars 2016

Simone VEIL, un destin français






La première femme politique de France


La nomination de Simone Veil comme ministre de la Santé était déjà une révolution : pour la première fois sous la Vème République, une femme devenait ministre de plein exercice. Sous Charles de Gaulle et Georges Pompidou, les femmes se contentaient de secrétariats d’Etat, avec des attributions réputées féminines, comme la famille, l’enfance et les personnes en détresse. Valéry Giscard d’Estaing et son Premier ministre Jacques Chirac avaient pris la mesure des changements de la société française.

Encore inconnue du grand public, l’ancienne magistrate, chignon serré et tailleur strict, entra dans l’histoire en prononçant, du haut de la tribune de l’Assemblée Nationale, une phrase qui sonnait comme une provocation : « Je veux tout d’abord vous faire part d’une réflexion de femme ». Il y avait alors dans l’hémicycle neuf femmes, l’ambiance était pour le moins virile, et Simone Veil expliquait calmement à ces messieurs ce qu’était le cycle des femmes, la grossesse et le fœtus. Cette grande bourgeoise n’avait pourtant rien d’une gauchiste ou même d’une féministe. La réserve n’était pas, pour elle, une simple obligation associée à ses fonctions de magistrate, puis de ministre. Simone Veil était une femme réservée, discrète. L’épouse parfaite d’un grand financier, la mère de trois garçons qu’elle élevait avec des principes stricts.

En politique, elle s’était engagée auprès d’une droite moderniste, incarnée d’abord par Jacques Chaban-Delmas, dont elle avait soutenu la campagne présidentielle. Elle fit toujours le choix d’un centre droit libéral et européen, et si le soutien de la gauche s’avéra indispensable lors du vote de la loi sur l’IVG, Simone Veil ne chercha jamais, par la suite à estomper les clivages politiques. Longtemps discrète sur sa propre histoire, celle d’une jeune fille brutalement plongée dans l’enfer de Birkenau et de Bergen-Belsen, elle fut à jamais blessée par les injures reçues dans les couloirs de l’Assemblée Nationale lors du débat sur l’IVG. Son rôle politique allait bientôt l’exposer aux pires campagnes antisémites. Elle fit face, avec une exceptionnelle dignité, en portant la mémoire de la Shoah, en travaillant à sa transmission. Peu portée sur les pèlerinages, elle revint à Auschwitz Birkenau, à l’occasion d’une commémoration, en janvier 2005, retrouvant ce vent glacial qu’elle n’avait jamais oublié. Toujours discrète sur sa propre souffrance, elle évoqua surtout les proches, les parents et les amis assassinés. L’image qu’elle donna ce jour-là fut celle de la dignité humaine. Et s’il faut un mot pour résumer Simone Veil, c’est bien le mot dignité.

Guy Konopnicki pour annoncer un hors-série de Marianne - mars 2016


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