mardi 26 avril 2016

Peut-on être viré de la Pléiade? (et autres histoires sur une collection mythique)





A l'occasion de la publication des deux tomes consacrés à l'écrivain péruvien Mario Vargas Llosa en mars dernier, on découvrira l'histoire méconnue de la pourtant célèbre Bibliothèque de la Pléiade à travers sept récits autour de Céline, Saint-John Perse, Raymond Queneau ou encore Milan Kundera.

Jean d'Ormesson en 2015. • Crédits : N. Messyasz - Sipa



Les tomes 1 et 2 des “Oeuvres romanesques” de Mario Vargas Llosa publiées ce 24 mars 2016 portent respectivement les numéros 610 et 611. L’écrivain péruvien, Nobel de littérature en 2010, est le premier étranger à intégrer de son vivant la Bibliothèque de la Pléiade, puisque Milan Kundera, qui l’a précédé en 2011, avait été naturalisé avant. L’occasion d’un retour en sept histoires sur cette prestigieuse collection méconnue.


1- “Votre petit Baudelaire me ravit”, écrit André Gide - ou comment Gallimard met la main sur une bibliothèque à succès

"Votre petit Baudelaire me ravit. C’est une merveille de présentation”, écrit André Gide à Jacques Schiffrin dans une lettre du 23 novembre 1931. Schiffrin vient de publier le tout premier numéro de sa Bibliothèque de la Pléiade. Editeur indépendant dont la famille est originaire de Bakou en Azerbaïdjan, il crée le format avec l’idée de rassembler la part majeure de l’oeuvre d’un écrivain en un même recueil, et donne à sa collection le nom d’un groupe de poètes de langue russe, même si on y voit aujourd’hui davantage une référence à la constellation du Taureau ou au groupe de poètes français du XVIème siècle dont faisaient partie Ronsard et Du Bellay.

Editant d’abord des auteurs russes, Schiffrin travaille étroitement avec Gide à qui il confie par exemple la traduction de La Dame de pique de Pouchkine. C’est Gide qui oeuvrera pour que Gallimard abrite la Bibliothèque de la Pléiade dont la trésorerie n’est pas suffisante pour absorber la demande forte dès les premiers succès. Schiffrin rejoint la Maison Gallimard d’où il pilote sa Bibliothèque jusqu’en 1940, date de l’aryanisation de la maison d’édition après le début de l’Occupation. Il reste trace d’une lettre que lui envoie Gaston Gallimard pour lui expliquer qu’il doit se séparer de lui. Jacques Schiffrin, avec l’aide de Gide, rejoindra New-York par un bateau du réseau Varian Fry, le même qu’Hannah Arendt ou Marc Chagall.
Gaston Gallimard en 1950. • Crédits : Universal Photo - Sipa


Alors que, ne souffrant pas de pénurie de papier bible, la Bibliothèque de la Pléiade pâtit beaucoup moins de la guerre que les autres collections, Schiffrin ne sera pas réintégré dans les rangs de Gallimard après la Libération, et meurt à New York en 1950.

2 - “Les 100 ouvrages que tout honnête homme se devrait d’avoir lu”, interroge Raymond Queneau - qui décide du catalogue ?

Longtemps aux manettes de la collection Pléiade chez Gallimard, Raymond Queneau avait adressé en 1949 un questionnaire à quelque deux cents auteurs éminents intitulé :

Quels sont les cent ouvrages que tout honnête homme se devrait d'avoir lus ?

L'universitaire Marielle Macé rapporte que des auteurs contactés par Queneau ont répondu... en citant leurs propres ouvrages. Déjà, à l’époque, la question de la canonisation d’auteurs estampillés “Pléiade” fait débat. Soixante ans plus tard, les polémiques autour du choix des auteurs "pléiadisés" ne sont toujours pas si différentes des débats quant à l'entrée de telle ou telle sommité au Panthéon. En commun, l’idée d’une consécration allant de pair avec cette entrée dans ce que Malraux qualifiait de “musée imaginaire”.
Raymond Queneau en 1970
Crédits : Ozkok - Sipa


Sur le web, on trouve moult blogs, parfois excellents et très bien documentés, dont l’auteur critique ici un nouvel ajout, encense là une consécration tardive. Avec une mention spéciale pour l'entrée de De Gaulle au temple des grands écrivains en 2000 ou encore l’annonce récente d’une arrivée imminente à La Pléiade de Jean D’Ormesson, féconde en polémiques. Traditionnellement, la Maison Gallimard ne justifie pas ses choix et s’il existe bien un directeur de collection (le même depuis 1997, Hugues Pradier), ce dernier est le premier à dire qu'Antoine Gallimard prend en réalité intimement part au pilotage du catalogue.

Catalogue qui a d’ailleurs évolué, intégrant un domaine étranger de plus en plus vaste y compris du théâtre sanskrit ou un volume “Sagas islandaises” paru en 1987.

L’historien Jean-Yves Mollier, spécialiste de l’édition, note aussi qu’entre 1980 et les années 2000, la Bibliothèque a montré un intérêt accru pour les correspondances ou les journaux, publiant par exemple la correspondance de Baudelaire ou le journal de Stendhal.“Les premières décennies ont été marquées par la constitution d’un fond classique en droite ligne avec les critères scolaires ou universitaires : Balzac, Zola, Corneille, Molière, La Fontaine… Puis l’ouverture s’est incarnée avec l’arrivée en Pléiade d’auteurs vivants comme Saint-John Perse ou Yourcenar. Enfin, la Pléiade a choisi de publier une littérature plus populaire, avec Jules Verne, Melville ou Mark Twain (l’auteur des aventures de Tom Sawyer)", poursuit Jean-Yves Mollier.

Au micro de José Artur dans “A l’heure du pop”, Antoine Gallimard confiait sur France Inter en 1993 avoir reçu quelques tomberaux d’injures lorsqu’il a décidé de sortir Sade en Pléiade. A l'époque, la Pléiade ne comptait pas encore Blaise Cendrars, Aragon, Boulgakov, Nabokov ou Francis Scott Fitzgerald.


3 - “Je n’aurai de cesse, vingt fois que je vous le demande” - un auteur a-t-il son mot à dire ?

Certains auteurs ont vivement insisté pour se voir publier à la Pléiade, à l’instar de Céline qui écrivait cette célèbre lettre à Gaston Gallimard en 1956 :

Les vieillards, vous le savez, ont leurs manies. Les miennes sont d'être publié dans la Pléiade (Collection Schiffrin) et édité dans votre collection de poche... Je n'aurai de cesse, vingt fois que je vous le demande. Ne me réfutez pas que votre Conseil, etc. etc... tout alibis, comparses, employés de votre ministère... C'est vous la Décision.

Céline a bien eu gain de cause, mais pas avant sa mort : Mort à crédit en Pléiade porte le numéro 157 en 1962. D’autres appels du pied se sont fait plus ou moins discrets. Saint-John Perse, qui avait à cœur d’être consacré de son vivant, relance plusieurs fois par courrier : "Il est temps, plus que temps, de passer à la mise en train de cette édition”, écrit-il en 1965 à Gaston Gallimard. Il finit par piloter son propre volume, allant jusqu’à rédiger tous les textes adjacents de l’oeuvre, et même de fausses correspondances - “Une oeuvre dans tous les sens du terme : il s’est voulu l’auteur de son tombeau littéraire, dont il façonné l’image”, décrypte Jean-Yves Mollier au sujet du premier auteur à avoir été publié de son vivant après Gide.

Si des auteurs ont pu faire le siège de Gallimard pour obtenir gain de cause, d’autres se sont montrés récalcitrants. Foucault, vieux pourfendeur de l’académisme et des institutions, aurait-il souri à ce clair-obscur que représente son arrivée dans le catalogue en 2015 ? Henri Michaux, en tous cas, avait refusé sa propre pléiadisation de son vivant. Que trouve-t-on aux numéros 444, 475 et 506 ? Trois tomes à son nom.

On ne peut pas pléiadiser un auteur contre son gré s’il s’y est rigoureusement opposé par écrit, ce qui revient en fait à l’indiquer dans son testament. Une simple opposition orale, toute aussi médiatique soit-elle, n’a aucune valeur : “Si le droit moral est propriété incessible de l’auteur et de ses ayants droit, l’éditeur est détenteur des droits patrimoniaux et reste libre d’éditer autant d’éditions qu’il veut”, explique Jean-Yves Mollier. Cas particulier : si nombre d’auteurs à la Pléiade appartenaient déjà au catalogue de Gallimard, il arrive qu’une négociation avec un autre éditeur détenteur des droits soit nécessaire. C’est ce qui a retardé jusqu’en 2012 la sortie de Francis Scott Fitzgerald après refus catégorique de l’éditeur et explique l’absence au catalogue de Beckett (publié aux Editions de Minuit).

Dans des entretiens inédits de 1975 accordés à Michel Contat, Jean-Paul Sartre racontait pourquoi il avait changé d’avis. D’abord hostile à une parution à la Pléiade, le philosophe a bien donné son accord. Il fait aujourd’hui l’objet de trois volumes sortis entre 1982 et 2010, qui distinguent “œuvres romanesques”, “théâtre complet” et “Les Mots et autres écrits autobiographiques”.



4 - “Mais vous pouvez avoir tout le théâtre de Racine dans votre poche” - la Pléiade est-elle vraiment l’autre Livre de poche ?

La confusion vient d’une affiche de publicité qui remonte à 1932, alors que Schiffrin s’apprête à publier le numéro 2, Racine. Le slogan dit : “Mais vous pouvez avoir tout le théâtre de Racine dans votre poche”.

Affiche de la Pléiade en 1932



Au-delà du fameux papier bible et de la reliure en agneau qui les distinguent de façon spectaculaire, les deux bibliothèques partagent surtout un format rigoureusement identique, au centimètre près. Démocratique, La Pléiade ? On peut régulièrement entendre Hugues Pradier, directeur éditorial, souligner combien cet objet de librairie rend accessible des œuvres intégrales, comme si l’enjeu était le prix à la page ou au poids. L’argument n’est pas neuf : André Schiffrin, le fils de Jacques, racontait à Alain Veinstein en 2008 que son père souhaitait d’abord s’adresser à des étudiants.


L’historien Jean-Yves Mollier, spécialiste de l’édition, nuance cependant cette vision :
"Dire que c’est une édition de Poche accessible serait totalement faux. La Pléiade a toujours été un objet luxueux, dont le contenant est en harmonie avec le contenu. L’enjeu a toujours été le prestige."



5 - “Vous m’en mettrez trois mètres” - qui achète les éditions La Pléiade ?

Jacques Attali raffole de cette anecdote qui dit beaucoup du prestige de la collection, lecteur compris : arrivés à Paris en pleine Guerre d’Algérie, les jumeaux Bernard et Jacques Attali se seraient vus offrir par leur père l’intégrale de la collection Pléiade dans cet appartement où l’on répondait à tout enfant piaffant d’ennui : “Tu n’as rien à lire ?”

Avoir des Pléiade a longtemps été un signe de distinction sociale. Nous ne disposons pas de nombreuses données sociologiques sur la clientèle, même si la Maison Gallimard mène régulièrement des enquêtes auprès du lectorat, qui restent secrètes. Fort peu de travaux académiques sont d’ailleurs consacrés à la Pléiade.  Jean-Yves Mollier a cependant eu accès à certaines données et raconte que la clientèle a longtemps été nombreuse parmi la bourgeoisie diplômée.
On sait que dans les années 60, les volumes qui sortaient à la Pléiade étaient systématiquement achetés par les médecins. C’était un signe ostentatoire de leur accès non seulement au monde de l’argent, mais aussi au monde de la culture.

Aujourd’hui et depuis les années 80,  la Pléiade a bien deux publics : d’un côté le public universitaire, lettré et même érudit, qui puise notamment dans ce qu’on appelle “l’appareil critique”, c’est-à-dire annotations, commentaires de texte empruntant à la génétique littéraire, notes de bas de page et autres préfaces ; de l’autre, le grand public, que Gallimard cherchera à cibler de plus en plus.


Pub Pléiade • Crédits : @Gallimard


Jean-Yves Mollier, lui, souligne un troisième public, essentiel : le lectorat étranger. L’universitaire rappelle ainsi un concours organisé par Gallimard il y a une petite vingtaine d’années, avec une Bibliothèque Pléiade intégrale à la clé. Surprise : outre l’affluence imprévue, une grande part des bonnes réponses émanaient de pays de l’Est ou d’Amérique latine. Ce lectorat étranger, qui lisait en français sur papier bible, a longtemps été essentiel. Le Péruvien Vargas Llosa, entré à son tour au catalogue ce 24 mars 2016 et premier étranger de son vivant (après Kundera, bien que naturalisé français), ne confie-t-il pas dans un avant-propos du premier tome de sa Pléiade combien la Bibliothèque est une pierre angulaire de sa conception de la culture ?

"Les volumes de la Pléiade que j'ai pris très tôt l'habitude de m'offrir à chacun de mes anniversaires [...] constituent à mes yeux ce territoire où n'accèdent que les oeuvres littéraires qui ont résisté à l'épreuve du temps et ont été définitivement consacrées comme dignes de faire partie de cette bibliothèque idéale, éternellement jeune et éternellement renouvelée, porteuse d'un message vivant pour les lecteurs de tous les temps, dans toutes les langues et toutes les cultures."

Ce lectorat-là a-t-il fondu avec l'influence de la culture classique française dans le monde, y compris sa part francophone ? Gallimard distille au compte-gouttes ces chiffres de vente comme les autres. Alban Cerisier, en charge des fonds patrimoniaux chez Gallimard, indique cependant que les ventes en 2006 étaient stables par rapport à 1956… mais pour un catalogue dont le nombre de titres avait quadruplé, avec aujourd’hui une dizaine de titres nouveaux par an. C’est-à-dire qu’il se vend toujours à peu près autant de Pléiade, mais beaucoup moins d’exemplaires de chaque volume. Autre indication : la Pléiade représente 10% du chiffre d’affaire net de la Maison avec quelque 300 000 livres écoulés par an (296 000 en 2015, selon le site Gallimard), contre 450 000 au plus fort du succès de la Bibliothèque, dans les années 80.

Si les ventes résistent globalement, trois auteurs se maintiennent particulièrement. Dans le peloton de tête depuis longtemps parmi les 207 auteurs au répertoire, plastronnent, dans l'ordre : Antoine de Saint-Exupéry, Marcel Proust puis Albert Camus. Viennent ensuite Verlaine, Rimbaud et Malraux. Sur France Culture, Antoine Gallimard confiait en revanche il y a quelques années que Saint Augustin, canonisé entre 1998 et 2002 en trois volumes, n'avait pas conforté leurs espoirs.

Si Bertrand Legendre, économiste spécialiste de l’édition, souligne l’intérêt marchand pour un éditeur à “pléiadiser” un auteur de son catalogue par effet d’entrainement jusqu’aux éditions les plus ordinaires, c’est aussi le prestige de toute la Maison Gallimard qui est dopé par la Pléiade. Le même Bertrand Legendre rappelle ainsi combien avoir Gallimard et donc la Pléiade en partenaire commercial peut jouer, du point de vue d’un éditeur étranger, lors d’une négociation de droits par exemple. Alban Cerisier, lui, relativisait l’effet de notoriété dans un colloque consacré à la Pléiade en 2007 à Aix-en-Provence : “Un quart seulement des personnes qui connaissent La Pléiade l’associent aujourd’hui spontanément à Gallimard”, rapportent les actes de ce colloque.




6 - “L’histoire est riche de testaments trahis” - qui dit Pléiade dit forcément “oeuvres complètes” et appareil critique ?

Jacques Schiffrin, comme aujourd’hui Hugues Pradier, a beaucoup valorisé l’idée d’œuvres complètes. Pourtant, les éditions d’oeuvres complètes concurrentes sont aujourd’hui nombreuses, jusque dans le giron Gallimard, d’ailleurs. Aujourd’hui, la Pléiade n’est plus systématiquement synonyme de complétude. D’autant qu’en publiant des auteurs vivants, l’éditeur s’est condamné à associé l’intéressé au choix des oeuvres. Le cas le plus emblématique fût sans doute celui de Kundera, “pléiadisé” en 2011. L’universitaire François Ricard, qui l’a accompagné dans cette aventure, raconte combien Kundera avait à cœur de contrôler ces volumes qui portent le nom “œuvre” au singulier avec la mention “édition définitive” :

Kundera a exclu tout ce que nous avons appelé “écrits de circonstance”. Certains sont pourtant très bons. Mais pour Kundera, ils n’ont pas la même signification, indépendamment de leur qualité. La notion de durée est essentielle : Kundera travaille infiniment ses romans et ses essais pour les dépouiller le plus possible de ce qui toucherait un peu trop à l’actualité. Il ne voulait pour la Pléiade que des écrits littéraires, et pas ce qui relève d’actes politiques ou d’interventions dans la vie sociale. Ce ne sont pas des oeuvres complètes, mais une sélection de ses livres.


Milan Kundera en 2010. • Crédits : Duclos - Sipa



Aucun brouillon ni variante, et un appareil critique réduit à une sobre “biographie de l’oeuvre” (sic) sans aucune note dans cet ouvrage publié de son vivant, alors que, quête du public universitaire oblige, les Pléiades publiés depuis les années 70 sont de plus en plus lourds d’un corpus parallèle au texte validé par l’auteur. Jean-Yves Mollier confirme cette tendance :

"L’appareil critique est quasiment absent ou très restreint jusqu’à la fin des années 60. Une légère introduction, une petite chronologie… Puis il sera de plus en plus important. Comparez par exemple La Comédie humaine dans son édition de 1935 et les volumes publiés à partir de 1975. Il n’y avait aucune note alors que la nouvelle édition est énorme !"

Se pose ainsi la question des écrits inachevés ou encore de la comparaison de deux versions, dont on ne sait pas toujours si elle aurait ravi l’auteur. Et que peut signifier l’idée de version définitive dans un cas comme Henri Michaux, connu pour publier deux voire trois fois un recueil de poèmes avant de l’envoyer enfin à Gallimard ? Son texte Emergences - Résurgences figure aujourd’hui en Pléiade en deux versions, une première mouture réputée “achevée” mais jamais envoyée ni publiée ayant été dénichée dans les archives de Michaud. Ce travail éditorial mené par Raymond Bellour avait fait débat à sa sortie.



7 - “Nous en reparlerons en l’an 2000”- peut-on être dépublié à la Pléiade ?

Chaque volume porte un numéro et si une édition se joue en deux volumes, elle tiendra sur deux numéros. Propos, du philosophe Alain, affiche ainsi les numéros 116 pour le tome 1 publié en 1956 et 217 pour le tome 2 sorti en… 1970. Chaque année, après l’été, Gallimard fait le point sur le plan de réimpression et décide, en fonction des stocks mais aussi des chiffres de vente, de réimprimer tel ou tel ouvrage et, parfois, d’en confier une nouvelle édition à un spécialiste. En ce cas, la nouvelle version sera marquée du numéro originel. Baudelaire, tout premier numéro, compte par exemple trois éditions de son premier tome d’Oeuvres complètes, toutes flanquées du chiffre 1, et sorties successivement en 1931, 1951 et 1975.

Cent quarante-huit titres du fonds sont réimprimés chaque année, d'après Gallimard. D’autres seront tout simplement abandonnés, et s’appelleront pudiquement “les numéros épuisés”. En fait, il s’agit de la frange du catalogue qui n’est plus réimprimée par Gallimard. Le plus souvent, le fait de faibles ventes ou d’une notoriété en berne. Ils sont quelques uns, souvent très peu connus du grand public ceci expliquant cela, à être sortis du catalogue réel de la Pléiade. On peut citer par exemple Agrippa d’Aubigné, Charles Cros mais aussi, plus connu, Benjamin Constant.

On découvre parfois par hasard qu’un auteur a été bouté hors du Panthéon bis. Mathias Enard, dans Boussole, raconte ainsi l’histoire de Germain Nouveau, sorti de la Pléiade avec pertes mais sans fracas : publié aux côtés de Lautréamont en 1970 (n°218) il ne survivra pas à son illustre voisin puisque Gallimard décide en 2009 de republier un plein volume avec le seul Lautréamont... sous le numéro 218 originel, désormais expurgé de son ancien colocataire, Germain Nouveau !



Et quand on interrogeait Raymond Queneau sur la postérité de sa “bibliothèque universelle”,  il hasardait cette réponse : "Nous en reparlerons en l’an 2000..."

Souces : ©France culture, ©Chloé Leprince

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