vendredi 28 juillet 2017

Epanalepse








L'ÉPANALEPSE

"L'épanalepse", du grec "épanalambanein", qui signifie reprendre, recommencer, d'où "épanalèpsis" (reprise, répétition), est une figure de répétition diversement décrite selon les auteurs.

Dans le vocabulaire de la stylistique, il s'agit d'un phénomène comparable à "l'antépiphore". L'antépiphore consistant dans la répétition, en tête et à la fin d'un ensemble verbal ou poétique (par exemple une strophe).

BAUDELAIRE a maintes fois eu recours à cette figure dans ses quintils, tel que dans son poème "Le Balcon" :

Mère des souvenirs, maîtresse des maitresses,

Ô toi, tous mes plaisirs ! ô toi, tous mes devoirs !

Tu te rappelleras la beauté des caresses,

La douceur du foyer et le charme des soirs,

Mère des souvenirs, maîtresse des maîtresses !


Dans "l'épanalepse" ce peut être la répétition, à intervalles plus ou moins réguliers, de la même phrase ou du même vers, soit la reprise en fin de vers ou de phrase du mot ou de l'expression qui le (ou la) commence, comme dans ce vers d'ARAGON :

Onze ans déjà que cela passe vite onze ans.

On la retrouve aussi dans ce quatrain de CORNEILLE, à chaque début de vers :

Rome, l'unique objet de mon ressentiment !

Rome, à qui vient ton bras d'immoler mon amant !

Rome qui t'a vu naître, et que ton cœur adore !

Rome enfin que je hais parce qu'elle t'honore !

Il y a tout un art de l'épanalepse et Louis ARAGON l'a possédé à la perfection lorsqu'il évoquait l'obsession des images, le retour des souvenirs, en une forme qui se rapproche alors, parfois, de la chanson :

LES LARMES SE RESSEMBLENT


Dans le ciel gris des anges de faïence

Dans le ciel gris des sanglots étouffés...

J'ai bu l'alcool transparent des cerises

J'ai bu les serments échangés tout bas...

Il me souvient des chansons qui m'émurent

Il me souvient des signes à la craie...




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Epanalepse ou antépyphore ?



7 commentaires:


  1. "Je suis mort parce que je n'ai pas le désir ;

    Je n'ai pas le désir parce que je crois posséder ;

    Je crois posséder parce que je n'essaie pas de donner ;

    Essayant de donner, je vois que je n'ai rien ;

    Voyant que je n'ai rien, j'essaie de me donner ;

    Essayant de me donner, je vois que je ne suis rien ;

    Voyant que je ne suis rien, j'essaie de devenir ;

    Essayant de devenir, je vis."

    RENE DAUMAL

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    1. Oui. Daumal. Poète sulfureux et difficilement cernable. Merci du rappel. En fait l'épanalepse de ce poème que vous prenez la peine de nous faire partager pourrait être les premiers mots et les derniers : "Je suis mort parce que" "je vis".

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  2. De retour, oui pour ma part après un long séjour londonien + Brigton and Hove.
    Epanalepse ou antépyphore ? Sincèrement, j'aime, croque ces mots et m'en fout en fait de saisir ou pas la virgule sémantique qui les sépare.
    Merci Nuage Neuf. Retrouver votre nourriture fait un bien fou !

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  3. Dans le sens où, pour Daumal, la conscience est un suicide perpétuel, oui, on pourrait dire :"Je suis mort parce que je vis", mais aussi parce le langage faillit à dire l'absolu. C'est aussi la raison pour laquelle Daumal consacre toute sa vie à l'étude du sanskrit, parce qu'il croit, malgré tout,qu'il existerait une lingusitique sacrée propre à lever les mystères.

    Mais vous avez raison, l'oeuvre de Daumal est difficilement cernable. Il est mort à 36 ans et pourtant il nous faudrait plusieurs vies pour explorer son oeuvre. Sa rencontre avec le danseur Uday Shankar me rappelle la rencontre de Shams et Rûmi. Immense poète, ce Daumal et plus que cela un "sage" entre les sages comme le confirmera Lanza del Vasto.

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