J'ai plus de souvenirs que si j'avais mille ans
Un gros meuble à tiroirs encombré de bilans,
De vers, de billets doux, de procès, de romances,
Avec de lourds cheveux roulés dans des quittances,
Cache moins de secrets que mon triste cerveau.
C'est une pyramide, un immense caveau,
Qui contient plus de morts que la fosse commune.
—Je suis un cimetière abhorré de la lune,
Où comme des remords se traînent de longs vers
Qui s'acharnent toujours sur mes morts les plus chers.
Je suis un vieux boudoir plein de roses fanées,
Où gît tout un fouillis de modes surannées,
Où les pastels plaintifs et les pâles Boucher,
Seuls, respirent l'odeur d'un flacon débouché.
Rien n'égale en longueur les boiteuses journées,
Quand sous les lourds flocons des neigeuses années
L'ennui, fruit de la morne incuriosité,
Prend les proportions de l'immortalité.
—Désormais tu n'es plus, ô matière vivante !
Qu'un granit entouré d'une vague épouvante,
Assoupi dans le fond d'un Sahara brumeux ;
Un vieux sphinx ignoré du monde insoucieux,
Oublié sur la carte, et dont l'humeur farouche
Ne chante qu'aux rayons du soleil qui se couche.
Charles BAUDELAIRE
Les Fleurs du mal, 1857
LXXVI. — Spleen
..."les pastels plaintifs et les pâles Boucher"...
François Boucher
Mademoiselle O'Murphy, 1752
* * *
Mademoiselle O'Murphy, on rêverait n'en faire qu'une bouchée.
RépondreSupprimerLa replète demoiselle O'Murphy, une belle pièce de boucher.
RépondreSupprimerMademoiselle O'Murphy de Boucher : une galantine qui attend son galant.
RépondreSupprimerPa mal vu ! Une galantine de pintade, comme celle dont parle Zola dans "Nana" :
Supprimer"On achevait des sorbets aux mandarines. Le rôti chaud était un filet aux truffes, et le rôti froid, une galantine de pintade à la gelée". (Nana,1880, p. 1177)
Chers intervenants,
SupprimerHors les jolies fesses de cette toile de Boucher, rien ne semble retenir un peu d'attention!!!