vendredi 28 août 2020

Lamartine. La nuit, quand par hasard je m'éveille

 




La nuit, quand par hasard je m'éveille, et je pense

Que dehors et dedans tout est calme et silence,

Et qu'oubliant Laurence, auprès de moi dormant,

Mon coeur mal éveillé se croit seul un moment ; 

Si j'entends tout à coup son souffle qui s'exhale,

Régulier, de son sein sortir à brise égale, 

Ce souffle harmonieux d'un enfant endormi !

Sur un coude appuyé je me lève à demi,

Comme au chevet d'un fils, une mère qui veille ;

Cette haleine de paix rassure mon oreille ; 

Je bénis Dieu tout bas de m'avoir accordé

Cet ange que je garde et dont je suis gardé ; 

Je sens, aux voluptés dont ces heures sont pleines,

Que mon âme respire et vit deux haleines ;

Quelle musique aurait pour moi de tels accords ?

Je l'écoute longtemps dormir, et me rendors ! 



Alphonse de Lamartine, 

De la grotte, le 16 décembre 1793

In Jocelyn (1836).





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